Préambule
Il y a autant de styles de navigation que de moyens de mouillage mis en oeuvre. A tel point que la ligne de mouillage est une option chez de nombreux fabricants de bateaux
- Naviguer de bouée en bouée sur la côte d’Azur
- Aller de port en port et de marina en marina en Sicile, ou sur les côtes italiennes
- Sortir à la journée pour revenir à son port d’attache
Ne nécessitent pas l’installation coûteuse d’apparaux de mouillage souvent très onéreux, lourds et encombrants, une installation sommaire, peut suffire. Il en va autrement si l’on sort du périmètre urbanisé de nos côte sursaturées. Là il faudra trouver les moyens d’assurer son indépendance au mouillage.
Une intense littérature a été produite sur le sujet. Le fantasme de l’ancre de miséricorde a suscité de nombreux marronniers sur des fora enflammés, et les noms d’oiseaux ont pu voler, les claviers étaient en feu.
Mais... des hommes sages ont commencé à déminer le terrain, sur des bases objectives et des raisonnements à bases scientifiques. Quelques exemples, ici sur PTP
- Banc d’essai des ancres, par Robert : http://www.plaisance-pratique.com/bancs-d-essais-d-ancres
- Le tableur des valeurs de mouillages d’Artimon :http://www.plaisance-pratique.com/Introduction-a-un-nouveau-tableur
- Et à un niveau plus modeste, main de fer ou croc de mouillage : http://www.plaisance-pratique.com/La-main-de-fer-ou-crochet-d#forum1745
Ceci acquis, on admet que les bonnes ancres modernes, chargées en pointe, sont devenues performantes. Mais, cela ne suffira pas, il faut que toute la ligne de mouillage soit homogène. Homogène et en phase avec les caractéristiques du bateau. Se pose en particulier le problème du poids à l’avant, et de l’encombrement. Pour y répondre, on admet aussi qu’une ligne mixte bien pensée peut être une réponse satisfaisante, avec des avantages et des inconvénients
Les avantages
- Le poids et la place : à l’évidence 30 m de chaîne de 10, rallongés de 30 m d’un câblot de 20 en nylon, pèseront moins que 60 m de chaîne (pas loin de 150 kg quand même)
- L’élasticité du cordage, surtout en polyamide, dont l’allongement allant jusqu’à 25% participe à la tenue du mouillage, par son potentiel d’absorption des coups de bélier par mer formée
les inconvénients
- il nécessite une épissure entre la chaîne et le câblot, qui sera un point de faiblesse à surveiller consciencieusement.
- Mais surtout, ses dimensions définitives, entre longueur de chaîne et celle du câblot, peuvent le rendre inapte à certains types de fonds et certaines hauteurs d’eau (les faibles hauteurs en particulier)
Les travaux avancés d’Artimon et de son tableur
Artimon, nous a montré les limites mécaniques de tenue d’une ligne de mouillage. Il propose l’installation à plat pont d’un circuit de câblot, bossé à la chaîne. C’est ce circuit qui amortira par son potentiel d’allongement les a-coups déclenchant les décrochage de la ligne de mouillage.
Mais, si sur un voilier de plus de 50 pieds, on peut attendre une forte réserve d’allongement, sur un voilier plus petit, plusieurs problèmes se poseront
- La longueur utile du circuit sur un voilier de 40 pieds, à fortiori pour un bateau encore plus petit, rendra pour partie inopérante l’élasticité espérée
- Mais surtout, le système limitera l’espace des passavants, rendant dangereux la circulation des personnes par gros temps.
- Enfin, il faudra bosser la chaîne, ce qui n’est pas évident pour tout le monde, dans l’espace restreint d’un petit bateau
Les interrogations d’un propriétaire de bateau de 40 pieds
Pour en avoir discuté avec d’autres utilisateurs de bateaux de même taille, il est apparu que si l’on ne pouvait pas trouver la solution sur le pont, il fallait la chercher ailleurs. L’idée de faire plonger les câblots, a fait surface (si, si...). J’en avais parlé à l’époque avec Artimon, sur son fil, et nous sommes équipés de deux câblots de 12 mètres de squareline polyamide 8 torons de 20 mm... La mise en place s’est révélée difficile, en particulier pour le bossage de la chaîne, et son passage dans le davier...
L’idée était de bosser chaque câblot sur la chaîne, en les laissant plonger et en donnant du mou à la chaîne, dans l’eau, puis de les ramener de part et d’autre de l’étrave par les chaumards, en le fixant aux taquets avant. Sauf que ça ne va pas, trop compliqué à monter et très difficile à remonter à bord.
une solution est apparue en travaillant sur le dossier de la main de fer, et particulier sur le potentiel de la manille de mouillage “Kong”
La manille de mouillage “Kong”, distribuée par “Osculati”Manille de mouillage pour raccorder rapidement une seconde ancre sur la chaîne principale. Une manille classique est en effet souvent difficile à introduire dans les maillons serrés d’une chaîne calibrée. Mais aussi, elle permet de frapper facilement un bout sur la chaîne et de reprendre latéralement et de chaque côté la tension pour éviter les à-coups et stabiliser le bateau au mouillage.
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Aide à l’affourchage, ou main de fer ???
Initialement prévue pour poser une deuxième ancre en affourchage, elle a été détournée de son objet pour servir de support à une main de fer. Son avantage à ce niveau étant le verrouillage que son manillon permet sur la chaîne principale. Sur le concept, seul Wichard propose un verrouillage, mais on sait sa médiocre qualité. Tous les autres système de croc peuvent décrocher brutalement sur un rappel dans du clapot.
On s’est donc mis à phosphorer sur le concept d’une “Kong” remplaçant le ou les nœuds de bosse. Et là, c’est l’œuf de Christophe Colomb :
Je n’ai besoin de deux câblots qu’en cas extrême
Les réglages de la ligne
On peut alors
- Opter pour la longueur de chaîne que l’on souhaite
- Choisir la longueur, la résistance du câblot
- Et panacher les réglages de la pose de la manille de mouillage sur la chaîne, en fonction des fonds, de la hauteur d’eau, des conditions météo.
Et bien sûr, le tableur d’Artimon validera ces hypothèses. Voir les photos ci dessous
règlage de beau temps | règlage par temps maniable | règlage de gros temps | détail de positionnement |
- Réglage de beau temps
- 10 m de fond
- 40 m de chaîne
- 8 m de câblot
- La chaîne est relâchée et sortie du barbotin
- Réglage de temps maniable
- 10 m de fond
- 50 m de chaîne
- 8 m de câblot
- La chaîne relâchée, est sortie du barbotin, et fixée au taquet
- Réglage de gros temps
- 10 m de fond
- 60 m de chaîne
- 8 m de câblot à bâbord
- 8 m de câblot à tribord
- La chaîne est sortie du barbotin, et plonge, retenue par le câblot tribord, fixé au taquet, avec un retour vers l’étalingure dans
la baille de mouillage. Le câblot bâbord travaille en harmonie avec celui de tribord
- détail de positionnement de la manille, en cavalier sur un chaînon. Une fois vissé, le “manillon imperdable”, bloquera le tout. on peut l’assurer avec un petit bout ou un rilsan.
L’équilibre de la ligne de mouillage
l’ancre 20 kg | la liaison chaîne/ancre | la chaîne : 60 m | la manille de mouillage | les câblots : 2 x 12 m |
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Rocna galva | ultra anchor UFS 10-35 | Galva, 10 mm, grade 40 | Kong/osculati | Squareline polyamide 8 torons 20mm |
bateaux jusqu’à 14m | Rupture : 8541kg | Rupture ; 5.120 kg | Rupture : 5000kg | Rupture : 8302 kg Allongement 13% |
550 € | 360 € | 500 € | 44 € | 150 € |
Les points délicats
- Résistance à la rupture de la manille de mouillage : c’est le manillon le point faible.
- Surdimensionné en 12, il offre une limite à la rupture donnée pour 5.000 kg et 1500 kg de CMU (SWL 15 kN). C’est le maillon faible de la ligne dans cette configuration.
- Cependant, s’il lâche, en conditions extrêmes, l’autre câblot fixé au taquet, assurera la tenue provisoire de la ligne.
- Sous la tension, il peut se déformer, et rendre difficile son démontage. Il faudra prévoir un passage suffisant dans le davier pour pouvoir le remonter et travailler à plat pont.
- Il faut l’assurer soit par un petit bout, soit par un rilsan, soit plus classique par du fil de fer galvanisé.
- Enfin, tous comptes faits, il n’est pas gros... Mieux vaut en prévoir en stock...
- Le passage et l’allongement des câblots dans les rouleaux du davier ou dans les chaumards.
- Selon leur conception, il faudra prévoir un dispositif de retenue du davier, pour éviter que le câblot d’en ressorte
- Il faudra surtout protéger les câblots, en les fourrant
- La nature du câblot
- Dans tous les cas, on préférera un câblot polyamide, pour son aptitude à l’allongement. Deux types de cordage
- 3 torons simples, c’est lui qui offre le meilleur coef d’allongement : 25%, pour Cousin Trestec
- Squareline 8 torons (4x2), offre un potentiel d’allongement de 13%, moitié moins que la 3 torons classique, mais par contre, sera plus facile à épisser, anti giratoire et anti coque.
- Se posera un problème avec le diamètre de l’œil de la manille “Kong” Il sera très difficile d’insérer une cosse lyre pour augmenter le diamètre de la boucle. Épisser directement une boucle, en diminuant son rayon, l’affaiblit. Cependant avec une charge de rupture de plus de 8 tonne, c’est à dire une charge utile de 2 tonnes, en prenant un coef de 1/4, laisse encore de la marge. Dans tous les cas, il faudra surveiller régulièrement cette épissure, et au pire en cas de rupture, on ne perd rien, l’autre câblot, étalingué assurera la tenue de la ligne. Au pire il faudra refaire une épissure
- Dans tous les cas, on préférera un câblot polyamide, pour son aptitude à l’allongement. Deux types de cordage
Compatibilité des bailles de mouillage et positionnement du guindeau - (màj oct 2016)
- La pertinence du choix du type de liaison câblot/chaîne, dépendra aussi de la configuration du treuil de relevage et de la baille de mouillage. Les 5 photos ci dessus le montrent bien. Entre un voilier quasiment fabriqué à l’unité et ceux issus d’une production industrielle, on aura du mal à trouver un dénominateur commun. En fait, c’est plutôt en terme de type de navigation que l’on trouvera des analogies.
- Bateaux de grand voyage => navigation extrême => Guindeau sur le pont => amortisseur sur le pont => nœud de bosse
- Bateaux haut de gamme => tout type de navigation => Guindeau/cabestan sur le pont => amortisseur pont/plongeant => manille
- Bateaux de série => navigation côtière => Guindeau sous le pont/cabestan arasant => amortisseur plongeant.
- A l’évidence, à chacune de ces classes de bateau correspond un type d’amortisseur idéal. Mais, le bon sens marin recommande d’adapter un type d’amortisseur et un type de liaison à chaque situation.
- Si la configuration permet l’installation d’un nœud de bosse, C’est la meilleure solution et la moins onéreuse.
- Si on ne peut installer facilement de nœud de bosse, Osculati propose deux solutions de manille :
- Sa manille de mouillage, dont la forme s’adapte bien à la chaîne, sans risque de déformation, en condition d’utilisation courante. par contre sa forme ouverte est sujette au décrochage dans le clapot
- Sa manille d’affourchage, avec un manillon bloquant, facile d’installation, peut présenter des risque de déformation en conditions extrêmes.
- Conclusion :
- Dans 95 % des cas (c’est une approximation) vous naviguerez, sur des bateaux de série dans des conditions climatologiques tolérables, et votre équipement de baille de mouillage et de guindeau suffira pour assurer votre sécurité
- Pour le reste, soit vous avez pris les moyens de vous équiper pour le long voyage, soit vous avez été surpris en navigation côtière par du mauvais temps plus fort que prévu. Dans ces conditions il faudra installer un amortisseur plongeant relié par un nœud de bosse, Enfin, pour la grande majorité, il faut rappeler les progrès des prévisions météorologiques, qui doivent vous éviter d’être surpris en mauvaise posture : http://www.plaisance-pratique.com/-...
Liens utiles
Chainerie limousine : http://www.chainlim.com/chaines/chaines-maritimes/
Jonction chaîne-ancre : https://www.ultramarine-anchors.com/flip-swivel-hook
Cousin Trestec : http://yachting.cousin-trestec.com/la-gamme/amarrage/squareline/
Manille de mouillage Kong pour Osculati : http://www.osculati.com/fr/cat/Scheda.aspx?id=248